
Un trait de lumière
Traverse les jours de peine
Éclairant ma nuit
Un trait de lumière
Traverse les jours de peine
Éclairant ma nuit
. S’émerveiller de voir le soleil émerger des nuages, même s’il ne le fait qu’au crépuscule.
. Frissonner sans savoir si c’est à cause de la fraîcheur du soir ou de la beauté du spectacle.
. Prendre conscience de la chance que l’on a d’être là et de pouvoir admirer cette explosion de couleurs.
. Oublier pour un instant les contrariétés de la journée.
. Ne garder en souvenir que le plaisir des échanges amicaux du jour, pour en nourrir ses rêves à venir.
« Écrire, c’est donner une profondeur au silence. »
Joe Bousquet
…
….
Derniers instants
Avant
Que le jour
Ne se fonde
Dans sa nuit
……..
Heure où la lumière
Exulte
Flambant ses
Dernières secondes
Avant
De libérer
Les ténèbres
……..
Jeux de cache-cache
Combat de gris
De roses et de bleus
Ou chacun sait
Que le noir
Gagnera
……..
Strates claires-obscures
Rayures roses et or
Étincelles éphémères
Déclinent
A l’horizon
……….
Heure où
Le silence
Est d’or
Habité
De l’espoir
Secret
Que le ciel
Derrière son masque
Obscur
Ouvrira ses bras
De velours noir
Aux étoiles
Pour ceux qui n’avaient pas eu l’occasion de lire mon texte écrit pour la journée de partage des « vases communicants » de ce mois avec Dominique Hasselmann, je le publie de nouveau. J’en profite pour le remercier pour sa photographie et pour cet échange agréable autour de nos textes et de la nuit…
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Photo Dominique Hasselmann
*
La nuit est à moi.
J’aime sa lumière glissant sur le bitume. J’aime l’ombre des arbres qui cache les immeubles, l’instant où la ville reprend son allure de jungle. Quand les hommes se taisent et disparaissent, l’instant où la ville bascule de l’autre côté du miroir. La rue devient un fleuve où les phares des voitures se noient. J’aime l’instant où les lucioles des boulevards prennent leur envol. Je les suis du regard et je m’envole avec elles jusqu’à la cime des arbres. De là-haut, je peux tout observer. La nuit, le monde est différent.
Il faut dire que j’ai l’avantage d’avoir une vision nocturne parfaite. La plupart des hommes ne distinguent pas grand-chose après le coucher du soleil, c’est pourquoi ils ont inventé les réverbères et autres Leds. Ils ont peur du noir. Ils ont peur de tout et surtout de leur vie.
Moi, je n’ai peur de rien puisque je n’ai plus rien à perdre.
Avant, je vivais dans une grange donnant sur la colline, je dormais dans la paille et je courais la campagne dès le lever du jour. J’en ai vu des matins de soie et des soirs de velours. J’en ai dégusté des soleils de miel et des pluies glacées. C’était ma vie, l’aventure et la liberté, dure mais intense, inoubliable. Rien d’autre à faire que de trouver ma nourriture du jour et ma couche de la nuit. La précarité, les bonnes et les mauvaises surprises, les rencontres de hasard, le froid, la faim, mais aussi la liberté. Vu d’ici, je la regrette un peu…
J’ai choisi de venir en ville. Je me demande bien pourquoi.
Les lumières, les paillettes, la promesse d’un avenir meilleur, l’illusion d’une certaine richesse dont j’aurais pu profiter, tout cela m’a attiré comme un aimant. Voilà sept ans que je traîne mes guêtres sur ce bitume. J’en connais chaque centimètre. J’ai appris à mes dépends qu’il ne faut pas empiéter sur le territoire des voisins. J’ai connu des jours meilleurs dans ma jeunesse, mais à mon âge il est difficile de changer de vie. J’ai fini par m’habituer à l’inconfort et à la misère. Si je reste c’est parce que j’aime la nuit sur la ville. Quand le jour pointe son nez, je me cache et j’attends la nuit. Elle me réchauffe dans ses bras de lune, elle me donne la force de continuer à courir l’aventure. Mes nuits sont plus lumineuses que leurs jours. Leurs nuits sont à moi.
Je ne vous raconterai pas mes nuits. Elles sont mon secret, faites de rencontres incroyables, peuplées de fantômes et de fées. J’ai exploré chaque rue, parcouru chaque pavé, en silence. Personne ne me voit, je sais passer en silence. Je glisse sur leurs trottoirs. Tapi dans l’obscurité, j’habite leurs porches. Ils ne savent pas que je suis là. Parfois l’un d’eux me donne un peu de nourriture en passant. Très peu ont le courage de croiser mon regard, en général ils évitent de lever les yeux sur ma maigreur. Une fois, j’ai vécu quelques semaines dans un appartement cossu avec une jolie fille qui avait craqué pour mes yeux verts. Je dois dire que ce fût un moment de grâce. Elle me donnait sa douceur et des petits plats élaborés avec amour, je lui donnais toute la chaleur qu’il me restait en retour. Puis une nuit, l’appel de la liberté a sonné à la porte et j’ai retrouvé le goût âpre du bitume…
Peu importe, je garderai mes semelles de vent. Si je mange peu, je serai plus léger pour suivre mes désirs. Je n’ai plus de chaînes même si je n’ai plus d’amour. La liberté a un prix, celui des larmes de la solitude et du sang ! Peu importe ce qu’il adviendra de moi, tant que je serai libre et que j’éviterai le filet de la fourrière.
texte : Marie-Christine Grimard
photo : Dominique Hasselmann
Je remercie pour sa présence pour la troisième fois sur cette page Dominique Hasselmann qui anime le blog Métronomiques où vous pourrez découvrir la richesse et la diversité de ce qu’il partage quotidiennement.
J’ai pris un grand plaisir à remplir ce nouveau vase communicant de nos textes échangés et le remercie d’avoir choisi d’orienter ce partage autour du thème de la nuit. Chacun a écrit son texte à partir d’une photo de l’autre prise une nuit sur la ville.
Vous pourrez retrouver mon texte si vous le souhaitez sur la page du jour de son blog où il me fait l’honneur de me recevoir.
Je vous laisse juger du résultat, et souhaite une belle navigation entre les lignes et les textes de ce mois-ci.
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« Tiers Livre de F. Bon et Scriptopolis sont à l’initiative d’un projet de vases communicants : le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement…
Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre. »
Sur le blog : Le rendez-vous des vases communicants tenu désormais par Marie-Noëlle Bertrand, ayant pris la suite d’Angèle Casanova et de Brigitte Célérier, vous retrouverez la liste des échanges de ce mois.
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Un jour, la nuit [2/2]
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Il y avait comme de l’électricité dans l’air, le ciel était un espace inaccessible ou insensible, je rêvais de le rejoindre mais il me manquait l’échelle à déployer pour y parvenir. La nuit, tous les chats n’étaient pas gris, l’un d’eux, noir aux yeux verts, me suivait depuis un certain temps le long de ce chemin mal éclairé.
Je marchais sans but et sans regret. Le « halage » n’existait plus, on ne voyait personne tirant une péniche ou la moindre embarcation depuis la berge. Le soir, aucun cycliste ne s’aventurait sur ce chemin pourtant goudronné, une atmosphère de pesanteur régnait dans le paysage malgré la suavité des roses célestes au-dessus de ma tête.
Mon téléphone se mit à vibrer (je pensais aux poteaux en bois qui se dressaient encore ici ou là), c’était juste un message d’information. Le gouvernement avait démissionné et une nouvelle équipe allait se remettre dare-dare au travail. La politique, même à la campagne, ne nous lâchait pas les baskets. Mais ici, pas besoin d’essence ou de « gazole », l’air pur suffisait à faire carburer les poumons.
Étrange, comme le calme enveloppait tout : quelques oiseaux se signalaient de temps en temps, peut-être un gentil « bonsoir » envoyé d’un merle à une pie voleuse (un baiser volé). Je me sentais seul – le chat me suivait toujours – et libre, dans ces moments où aucune voiture n’encombrait ma route, où aucune cheminée d’usine ne lançait vers le ciel ses fumées nauséabondes, où les klaxons à deux tons des véhicules de police ou des ambulances ou des pompiers ne vrillaient mes oreilles.
Je savais qu’au bout du chemin il y aurait le café qui s’ouvrirait vers les 7 heures du matin, on était bien encore à 20 km, et je demanderais un petit bol de lait pour mon compagnon de fortune. Ma mémoire me disait que le bistrot s’appelait « Aux mariniers », sans doute une enseigne qui devait dater de l’époque où ils étaient nombreux à naviguer sur la Marne.
Je rêvais déjà de ce petit-déjeuner : une demi-baguette, toute fraîche, une grande tasse de café noir, il me manquerait juste un journal à feuilleter (mais « Libération » était devenu aussi maigre qu’un jour sans pain). Au long de mon parcours, j’avais baptisé le chat : «Hibou».
Maintenant, le ciel changeait de couleurs peu à peu : il irait sans doute vers l’uniformité du bleu, laissant ses divagations nocturnes me plaire pour une autre randonnée sans horizon autre que celui de mon imagination parfois trop vagabonde.
texte : Dominique Hasselmann
photo : Marie-Christine Grimard
***
Juste au bord
De la nuit
Sans remords
Et sans bruit
Ton âme s’endort
*
Juste au bord
De la vie
De minuit à l’aurore
L’espoir revit
*
À tire d’ailes
Ton âme s’envole
Vers l’irréel
*
Elle est si belle
Cette luciole
Qui étincelle
*
Juste au bord
De la nuit
Sans effort
Tu t’enfuis
*
Juste au bord
De la nuit
Sans remords
Et sans bruit
Ton âme s’envole
*
Aux tréfonds de la nuit
La sentinelle luit
Sans couleur et sans bruit
Guidant les insoumis
*
Une étoile s’envole
Au bout de l’univers
En semant sa poussière
De lucioles en lucioles.
*
Et l’enfant la regarde
S’approcher de sa vie
Rêvant qu’elle s’attarde
Jusqu’au bout de sa nuit
*
Vole, étoile ma sœur
Valse en apesanteur
Et emporte mon cœur
Là où meurent les peurs
*
Raconte-moi l’espace
L’ombre et puis la lumière
Et je suivrais ta trace
De demains en hiers.
*
Avec toi j’apprendrai
La patience et l’envie
La beauté de la vie
Au goût de Liberté
« Un peu de folie est nécessaire pour faire un pas de plus. » Paulo Coelho
Pourquoi faudrait-il continuer ?
Pourquoi devrais-je poursuivre la route dans ce froid, dans ce vent, dans cette nuit ?
Je serais mieux au chaud dans mon lit…
La nuit étire son écharpe de givre, s’accroche au pare-brise, s’insinue sous ma peau, humide, glacée.
Qu’est-ce qui m’oblige encore à me jeter sur ce chemin ?
Il serait si simple de rester là, de jeter l’éponge, d’attendre que le printemps revienne.
De l’autre côté de la vitre, l’obscurité ne lâche pas, elle encercle les arbres, elle étouffe les sons.
Donnez-moi une seule bonne raison de continuer, il faudrait être fou pour avoir envie de faire un pas de plus dans ce monde.
*
Pourtant…
Il faut bien que quelqu’un se lève pour que la vie change, que ce monde sourd écoute les battements de son cœur, que ce monde étrange avance vers la lumière, et que la vie sourie encore.