« Les pousses des cassis que tu froissais, l’oseille sauvage en rosace parmi le gazon, la menthe toute jeune, encore brune, la sauge duvetée comme une oreille de lièvre, tout débordait d’un suc énergique et poivré, dont je mêlais sur mes lèvres le goût d’alcool et de citronnelle… »
Colette. Les vrilles de la vigne.
.
J’ouvre une page de Colette au hasard, et recopie la première phrase lue.
Tout est là.
Il n’y a qu’à se délecter de ses mots, et l’on est auprès d’elle, assis au beau milieu des parfums du jardin. Rien de plus à faire que laisser couler ses phrases pour sentir sur nos lèvres le goût de la citronnelle…
.
.
Alors, suivre les fragrances qui s’offrent.
Se coucher dans l’herbe à plat ventre, le nez dans le gazon, à ras les pâquerettes.
Et rêver à l’été qui viendra, au sucre des cerises quand elles sont presque noires, à la pointe de vanille qui habite les roses à la tombée du jour…
.
.
S’émerveiller d’un rien.
Où que l’on se tourne, admirer chaque arpent de jardin comme on tourne les pages d’un livre que l’on aime, même en l’ayant lu cent fois.
Connaître chaque fleur et la trouver plus belle que l’année précédente, puisqu’elle est encore là. Compter chaque pétale comme on compte les jours de l’été finissant quand on sait que l’automne frappe déjà à la porte.
.
.
Être consciente du privilège que l’on a de vivre ici, en paix et en liberté, même relative puisqu’annexée à celle des autres.
Profiter de l’instant puisqu’il m’est donné si généreusement par la terre où je vis, en occultant un instant le travail fourni pour aider la nature à donner le meilleur d’elle-même.
Même si la fureur du monde tonne alentour, même si les esprits chagrins pensent que les fleurs ne servent à rien au regard des convulsions du monde, je vous les offre pour qu’un bref instant vous ressentiez la caresse du vent et le parfum des roses sur votre visage, en oubliant le temps qui passe…
.